Des "Sentinel" au service de la surveillance des mangroves mahoraises
Les mangroves de Mayotte sont parmi les plus menacées à l’échelle nationale. Pollution, défrichement, érosion sont autant de facteurs de fragilisation du milieu. En parallèle, les services en charge de la gestion de cet écosystème ne disposent pas suffisamment de moyens humains pour contrôler toutes les mangroves de manière continue dans le temps. Par conséquent, les agents de terrain constatent donc après coup d’éventuels dégâts ou pollution et il est alors trop tard pour intervenir ou pour identifier d’éventuels causes ou responsables. Pour remédier à cette situation, il a été envisagé d’utiliser les récents progrès en traitement d’images satellites pour venir en appui à la gestion des mangroves.
Mayotte compte aujourd’hui environ 690 ha de mangroves publiques, réparties sur tout le littoral de l’île en petites formations végétales parfois exiguës. Face aux menaces qui pèsent sur cet écosystème, le Parc naturel marin, la DEAL, l’ONF et l’Université de Nantes se sont associés autour d’un projet visant à l’exploitation des données satellitaires européennes issues du programme Sentinel[1] dans le but de mettre en place un système de surveillance des mangroves.
Ce sont ainsi trois indicateurs cartographiques qui vont être suivis :
- la surface des mangroves, qui permettra l’identification d’éventuels défrichements ou zones d’érosion ;
- la vitalité des peuplements, quantifiée notamment grâce à l’analyse croisée de deux indices de végétation (NDVI et fraction végétale) dont la dynamique peut être impactée par une pollution ;
- les types de peuplements, qui permettront d’identifier d’éventuels changements de composition ou d’organisation de la mangrove (mobilité des différentes limites internes entre les faciès de mangroves).
La mise en œuvre de ces trois indicateurs se fera via l’exploitation croisée de deux types d’images satellites : des images optiques (Sentinel-2 MSI) et des images RADAR (Sentinel-1 SAR-C). L’idée de croiser ces deux types de données provient du fait que les images optiques possèdent l’inconvénient d’être sensibles à l’ennuagement, ce qui pose un vrai problème en zone tropicale. Pour pallier cette limite, l’utilisation du capteur RADAR dit « actif » (car il envoie son propre rayonnement – ici des rayonnements micro-ondes – à la surface de la terre et en mesure ensuite l’écho) est donc envisagée. Chacun des deux capteurs permet de disposer gratuitement de 2 images par mois de toute l’île. Avec une résolution spatiale de 10 mètres, les capteurs Sentinel forment donc une source de données privilégiée pour la surveillance des mangroves.
Figure 1-Capture d'écran de deux images Sentinel. A gauche une image Sentinel-2 en composition colorée ; A droite, une image Sentinel-1 calibrée en rétrodiffusion et corrigée des effets de pentes. A noter, la sensibilité du capteur Sentinel-2 à l’ennuagement : les zones cachées sous les nuages ou à l’ombre des nuages sont quasiment voire totalement inexploitables. A l’inverse l’image radar, ici à droite, ne souffre aucunement de l’ennuagement. A noter également que ces deux images ont été réalisées à partir du logiciel SNAP un logiciel gratuit développé par l’Agence Spatiale Européenne spécifiquement pour l’exploitation des données Sentinel.
L’objectif du projet de recherche, actuellement réalisé dans les locaux du laboratoire LETG à l’Université de Nantes, est de valider ou non la démarche et d’explorer les différentes pistes de réflexion issues du croisement de deux types d’images et de trois indicateurs pour appuyer la surveillance des mangroves. Le projet a débuté au 1er janvier 2018 pour une période de 6 mois. Les premiers résultats sont attendus pour le mois de mars.
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Florent Taureau (2018)