Le Conseil d'État conforte la nouvelle définition des zones humides
Par une décision du 17 juin 2020, le Conseil d'État a refusé de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) posée par la société Roybon Cottages.
La société requérante soutenait que :
- les dispositions de l’article 23 de la loi du 24 juillet 2019 modifieraient les dispositions du 1° du I de l’article L. 211-1 du code de l’environnement relatives à la définition d’une zone humide, portent atteinte au droit à un procès équitable garanti par l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789, faute de comporter des dispositions transitoires.
… ce qui a été rejeté par le Conseil d’Etat (au nom de la non rétroactivité de ladite loi). - les dispositions contestées méconnaîtraient les stipulations de l’article 7 de la Charte de l’environnement en ce qu’elles ont été adoptées sans la participation du public et sans que celui-ci ait été informé de leurs incidences sur l’environnement. Toutefois, le Conseil d’Etat pose que le grief tiré de la méconnaissance de la procédure d’adoption d’une loi ne peut, en tout état de cause, être invoqué à l’appui d’une question prioritaire de constitutionnalité sur le fondement de l’article 61-1 de la Constitution.
Une saga "zone humide"
Dans la décision rendue du 22 février 2017, le Conseil d’État avait précisé l'application de la définition d'une zone humide. Il avait estimé que les deux critères cités par l’article L211-1 du code de l’environnement -sol hydromorphe et végétation hygrophile- devaient être constatés pour définir une zone humide. Cette interprétation va à l’encontre de toutes les décisions, textes réglementaires et jurisprudences,qui considéraient jusqu’alors que l’un des deux critères seul suffisait.
Le Conseil d’Etat précisait également que cette définition contredit celle posée par l’arrêté du 24 juin 2008. Lorsqu’il s’agit de déterminer si un terrain constitue une zone humide ou pas, l’arrêté du 24 juin 2008 doit donc s’effacer au profit de la décision du Conseil d’Etat.
La loi portant création de l’Office français de la biodiversité, du 26 juillet 2019, reprend dans son article 23 la rédaction de l'article L. 211‑1 du code de l’environnement portant sur la caractérisation des zones humides, afin d'y introduire un "ou" qui permet de restaurer le caractère alternatif des critères pédologique et floristique.
Ainsi désormais l'arrêt du Conseil d'Etat du 22 février 2017 n'a plus d'effet, de même que la note technique DEB du 26 juin 2017 devenue caduque : la nouvelle définition législative s'impose à compter de ce jour, sur tous les dossiers de demande d'autorisation, déjà déposés et à venir.
Elle n'a pas besoin de texte d'application et toute décision qui serait prise après ce jour, sans tenir compte de cette nouvelle définition, serait illégale.
Cette nouvelle décision du 17 juin 2020 du Conseil d'Etat conforte la nouvelle définition reglementaire des zones humides et précise, discrètement mais nettement, que la nouvelle loi ne s’applique pas aux litiges antérieurs.
En savoir plus
- Décision du CE, 17 juin 2020, n° 438062
- Rétablissement des critères alternatifs pour définir les zones humides (26 juillet 2019)