Les espèces exotiques envahissantes et l’outre-mer
La France d’Outre-mer abrite 4 des 34 « points chauds » de la biodiversité mondiale (Hot Spots : zones qui contiennent au moins 1 500 espèces de plantes endémiques et ont perdu 70 % et plus de leur habitat original). Elle porte donc une responsabilité de premier plan pour la préservation de la diversité biologique de la planète. Ces territoires abritent davantage de plantes et de vertébrés endémiques que toute l’Europe continentale.
Les territoires d’Outre-mer correspondent largement à des îles. Ces écosystèmes ont connu une évolution spécifique qui les rend particulièrement vulnérables aux introductions d’espèces nouvelles ; les espèces y sont en effet peu adaptées à la concurrence et à la prédation (oiseaux incapables de voler par exemple).
Les très nombreuses espèces amenées par l’homme sur ces territoires y causent des dommages considérables. Parmi les espèces inscrites sur la liste rouge de l’UICN présentes en outre-mer, un amphibien sur trois et plus d’un oiseau sur deux sont directement menacés par des espèces exotiques envahissantes.
Les plantes envahissantes
On estime ainsi que 1200 espèces de plantes ont été introduites aux Antilles, 1400 en Nouvelle Calédonie et 2000 à la Réunion. 49 espèces figurant parmi les 100 plus envahissantes au monde sont présentes dans les collectivités françaises ultramarines.
Les plantes aquatiques comme la jacinthe d’eau, la salvinia, ou la laitue d’eau menacent toutes les zones humides tropicales d’outre-mer. A la Réunion, les étendues d’eau douce littorale sont régulièrement envahies par ces plantes. En février 2006, l’étang de Gol l’était sur la totalité de sa surface par la jacinthe d'eau et la laitue d'eau.
Des arbustes à croissance rapide et à reproduction précoce, adaptées à la faible luminosité des sous bois, et produisant de grandes quantités de fruits, comme le miconia (Miconia calvescens) envahissant à Tahiti ou le troène de Ceylan (Ligustrum robustum), à La Réunion, représentent une menace pour toutes les forêts denses humides intactes ou peu perturbées d’outre-mer.
Quelques exemples
- En Nouvelle-Calédonie, le black bass (Micropterus salmoides), un poisson introduit, en 1960, pour la pêche sportive et pour le contrôle des populations de tilapia (un autre poisson introduit) constitue aujourd’hui une menace majeure pour des espèces comme le poisson endémique Galaxias neocaledonicus, vestige de l’ancienne faune de Gondwana et aujourd’hui proche de l’extinction.
- A Wallis et Futuna, sur 5 espèces de poissons recensées dans les eaux douces de Wallis, deux sont des espèces introduites : le guppy et le tilapia du Mozambique. Ce dernier est un poisson omnivore dans l’impact potentiel sur les écosystèmes aquatiques est important.
- A Mayotte, l’invasion du tabac-bœuf, un arbuste également envahissant à la Réunion, menace les derniers vestiges de forêts humides. La lutte s’organise contre la salvinia, une fougère exotique aquatique qui envahit la réserve d’eau douce de Combani, pouvant causer des problèmes dans le traitement de l’eau potable.
- En Guadeloupe, le pomme-rose, un arbre originaire d’Asie tropicale, a largement colonisé et transformé une grande partie des forêts de bord de rivière de basse et moyenne altitude à l’intérieur même du Parc National.
- En Guyane, les chiens errants sont un problème majeur, notamment pour la conservation des populations de tortues olivâtres, une espèce classée en danger par l’UICN, dont ils attaquent les femelles reproductrices et détruisent les pontes.
Source: Soubeyran Y. (2008). Espèces exotiques envahissantes dans les collectivités françaises d’outre-mer. Etat des lieux et recommandations. Collection Planète Nature. Comité français de l’UICN, Paris, France.