Refus du juge d’ordonner une remise en état
Le juge refuse de prononcer la remise en état des lieux effective d’une zone humide remblayée. Il a considéré, que même si les lieux n’ont pas retrouvé leur caractère initial, d’une part, ceux-ci ont été pour partie mis en culture (céréales), ce qui implique, malgré tout un certain retour à « l’état naturel », d’autre part, même s’il était procédé à l’enlèvement du remblai, le retour à l’état initial de végétation est susceptible de prendre plusieurs an- nées. Le juge en conclut que le prévenu a effectué des travaux satisfaisants de remise en état. Toutefois, compte tenu de la gravité de l’infraction dont les conséquences risquent de ne pas pouvoir être intégralement réparées avant plusieurs années, le prévenu est condamné à une amende de 3 000 € et à payer 750 € de dommages et intérêts à une association.
CA Chambéry, 18 nov. 1999, n° 99/825
Un prévenu est condamné pour des travaux de drainage sur une surface de 60 ha de zones humide sans au- torisation. Le tribunal correctionnel l’avait condamné à une remise en état du site situé en ZNIEFF de type I et II et ZPS, dans un délai de 18 mois et sous astreinte de 2000 € par jour de retard. En revanche, la la CA de Poitiers considère que la peine n’est pas adaptée car il faudrait selon les experts 30 à 50 ans pour la remise en état des prairies et du bocage et qu’une remise en état de cette envergure nécessite des moyens et des délais qui dépassent ceux prévus la réglementation applicable. Le prévenu est condamné à 3 mois d’emprisonnement avec sursis et 18 000 € d’amende tandis que les trois associations reçoivent 1 500 à titre de dommages et intérêts.
CA Poitiers, 23 nov. 2006, n° 06/00466
Un prévenu avait réalisé des travaux de création de plan d’eau 1 200 m² pour la production de grenouilles, sans déclaration, qui avaient entraîné la mise en eau d’une zone humide. La superficie totale de l’ouvrage (plan d’eau et remblais) était estimée à 3 000 m². Le juge prononce un ajournement de peine : il ordonne au prévenu, non une remise en état intégrale, mais la réduction du plan d’eau en dessous de la superficie correspondant au seuil de déclaration soit 1 000 m² au plus et ce, dans un délai de 7 mois à compter du prononcé du jugement.
T. pol. Besançon, 1er mars 2011, n° 09272000091
Des travaux ont été réalisés sans déclaration préalable, conduisant à l’assèchement d’une zone humide, en l’espèce le creusement de fossés d’une profondeur moyenne de 40 cm, atteignant par endroits la roche mère, à l‘aide d’un engin mécanique. A ceci s’ajoutant le curage d’un ruisseau sur 68 mètres. La Cour confirme la culpabilité du prévenu pour avoir, sans déclaration préalable, procéder à ces travaux. Toutefois, elle dispense de peine le prévenu (1500 € avait été ordonné par le tribunal) et ne confirme pas la remise en état des sols avec astreinte par jour de retard, ordonnée en première instance. L’association requérante reçoit 350 € au titre de son préjudice moral.
CA Pau, 9 oct. 2014, n° 14/00310
Sur le cas d’une zone humide remblayée, le juge a considéré que l’enlèvement de déblai sur une couche d’un mètre n’est pas suffisant pour permettre la restauration de l’écosystème. Le juge s’est basé sur les travaux d’un expert qui a estimé que la remise en état des lieux sollicitée dans le cadre de l’action civile ne présente au- cune pertinence d’un point de vue écologique. Par ailleurs, les préconisations de remise en état de l’ONEMA aboutiraient à une réparation excédant largement les limites du dommage directement causé par l’infraction, car le remblai dont cet organisme prône la suppression résulte aussi, et dans une large proportion, de dépôts étrangers et antérieurs à ceux imputés aux prévenus dans le jugement définitif. La Cour conclut que même s’il n’est pas formellement établi que le site a été remis dans son état antérieur à la commission des infractions, elle considère que la restitution sollicitée par la partie civile n’est ni utile d’un point de vue écologique ni fondée juridiquement, en ce qu’elle imposerait aux prévenus une réparation excédant le dommage causé par leur faute.
CA Bastia, CA corr., 17 déc. 2014, n° 54
A la suite de travaux illégaux de remblaiement dans une zone de marais inondable sur une surface de 4 800 m² pour la création d’un plan d’eau, le prévenu a été mis en demeure de cesser immédiatement les travaux et de remettre les lieux en état, ce qu’il a refusé de faire. Compte tenu de l’obstination du prévenu - alors pourtant qu’il connaissait la réglementation applicable et qu’il avait été avisé de l’illégalité des opérations envisagées - celui-ci est condamné à une amende de 2 000 €. La Cour estime néanmoins que la demande de remise en état n’apparaît pas fondée ni opportune, au regard de l’ancienneté de la situation, étant observé, d’une part, que cette remise en état n’était pas prévue à l’époque de la prévention, à titre de peine complémentaire, et qu’aucune demande en ce sens n’a été adressée au prévenu par l’administration. L’association se voit accorder 1 000 € pour son préjudice moral.
CA Rennes, 25 juin 2015, n° 13/01703
Le juge refuse de faire droit à une demande en référé d’une association estimant illégale la création d’un bas- sin de rétention impctant une zone humide (construction sans déclaration IOTA, en infraction avec le PLU et incompatible avec le SDAGE Loire-Bertagne) et demandant la démolition de ce bassin et l’enlèvement des déblais ainsi que le dépôt d’un dossier de déclaration par le maître d’ouvrage. Le juge estime qu’il n’appartient pas au juge des référés (civil) d’apprécier la portée d’une décision administrative (question de savoir si le permis d’aménager prévoyait bien d’implanter le bassin de rétention en zone humide), ni même d’apprécier si le permis d’aménager est conforme au plan local d’urbanisme.
TGI Quimper, Ord., 20 avr. 2016, n° 16/00035
A la suite d’un remblaiement de 4 000 m² de zones humides (et cours d’eau) sans déclaration, le juge ordonne une mesure d’expertise à caractère biologique, botanique et scientifique. Un second jugement prononce l’ajour- nement de la peine avec obligation de remise en état. Un troisième jugement ordonne un complément d’exper- tise. Un quatrième jugement prononce une amende 800 € compte tenu de la remise en état seulement partielle mais n’ordonne pas de nouvelle mesure de finalisation de la remise en état. Les trois associations reçoivent, au titre de leur préjudice moral, 800 € chacune.
T. pol. Limoges, 20 janv. 2017, n° 13127000071
A la suite de remblaiements de zone humide sans autorisation sur une surface de respectivement 15 et 16 ha, des personnes morales sont condamnées à 20 000 € d’amende dont 10 000 € avec sursis, tandis que les deux personnes physiques le sont à hauteur de 12 000 €, dont 6 000 € avec sursis. Le juge rejette la remise en état compte tenu d’un arrêté d’autorisation ayant régularisé le projet.