Retour sur la 12 ème Conférence des Parties de la Convention de Ramsar

La 12ème Conférence des Parties de la Convention de Ramsar sur les zones humides s’est tenue, du 1er au 9 juin 2015, à Punta del Este (Uruguay).
Elle a réuni 141 des 168 Parties, et a adopté seize résolutions dont certaines cadrent l’action de la Convention pour les années à venir : Plan stratégique 2016-2024, dans lequel doivent s’insérer les Plans nationaux ; Programme de travail de communication et sensibilisation 2016-2024, qui inspirera le nouveau dispositif français ; nouveau Cadre de travail du Groupe scientifique et technique (GEST), qui rapproche ce dernier des attentes du terrain.
D’autres résolutions intéressent directement la France, en particulier celles portant sur l’évaluation de la gestion, la prévention des risques, les petites îles méditerranéennes, mais surtout celle instituant un nouveau Label pour les villes, qui doit être prochainement lancé au niveau national.
 
 
A été mise fortement en avant lors des travaux, la nécessité de rechercher, à tous niveaux, des synergies avec les autres Conventions proches, en premier lieu la Convention sur la diversité biologique, pour permettre un renforcement global de l’efficacité des actions.
Souhaitant maintenir son investissement, la France reste membre, suppléant, du Comité permanent, dont le rôle est de superviser les affaires de la Convention et les activités du secrétariat.
 
À noter pour cette COP (Conférence des Parties) la présence très forte de l’Initiative méditerranéenne pour les zones humides, MedWet, qui, avec l’ « Agora méditerranéenne », a su créer unlieu de présentations et d’échanges dont le succès a largement dépassé les vingt-sept pays membres !
Enfin, on doit féliciter la Fondation Tour du Valat, une fois de plus très investie dans de nombreux événements parallèles de cette COP, lauréate du Prix du mérite Ramsar pour ses 61 ans d’engagement sans faille en faveur de la préservation de ces milieux.
 

La prochaine COP se tiendra en 2018 aux Émirats arabes unis.

A également été présentée la convention bientôt signée entre Uruguay, France et Fonds français pour l’environnement mondial (FFEM), suite à une première phase ayant permis la mise en place d’un Système national d’aires protégées sur le modèle et avec l’appui des parcs naturels régionaux français (notamment PNR du Vercors et de Camargue), pour travailler au développement économique des territoires en poussant à l’adoption de bonnes pratiques compatibles avec le maintien de la biodiversité et des services fournis par les écosystèmes. Le FFEM apportera 1 M€ sur les 8,7 M€ du projet.

 

Le 4ème Plan stratégique de la Convention de Ramsar

Ce plan a pour vision : « les zones humides sont conservées, utilisées de façon rationnelle et leurs avantages sont reconnus et appréciés de tous » ; par cette vision les Parties contractantes affirment leur volonté d’agir plus radicalement pour mieux assurer la préservation de ces milieux toujours très menacés.
Bien que poursuivant les actions entreprises précédemment, ce plan a été entièrement redéfini et intègre avec force l’articulation avec les autres Conventions, notamment avec les Objectifs du développement durable de la Conférence Rio+20, et surtout avec la Convention sur la diversité biologique (CDB) : il s’inscrit en effet dans la mise en oeuvre des objectifs d’Aïchi et sa durée passe de six à neuf ans, sur la période 2016-2024 avec une révision aux deux tiers du parcours, afin de pouvoir prendre en compte les travaux de la CDB dont la COP (Convention on Biological Diversity) se tiendra en 2020.
 
Le nouveau Plan fixe dix-neuf objectifs répartis au sein des quatre buts stratégiques suivants :
- En s’attaquer aux moteurs de la perte et de la dégradation des zones humides, objectif nouveau demandant aux Parties de mobiliser davantage les acteurs pertinents et l’ensemble des politiques impactantes ;
- En conserver et gérer efficacement le réseau de sites Ramsar, objectif récurrent de mise en oeuvre de l’un des axes majeurs de la Convention ;
- En utiliser toutes les zones humides de façon rationnelle, objectif élargissant la prise en compte des milieux humides au-delà des seuls sites « Ramsar » ;
- En améliorer la mise en oeuvre de la Convention, objectif opérationnel recherchant une mobilisation forte et entière de tous les organes de la Convention, et de tous les partenaires et acteurs, à tous les niveaux.

Pour la première fois, il définit un socle d’indicateurs, qui sera toutefois complété lors de la prochaine COP.
La France, co-présidente du groupe de travail sur ce projet, souhaite poursuivre son investissement notamment au niveau de la définition de nouveaux indicateurs et de la mise en oeuvre du Plan au niveau national, dans le cadre du 3ème plan national 2014-
2018 et de ses suites.

Outre l’adoption de ce nouveau programme de Communication, d'éducation, de sensibilisation et de participation (CESP) pour la période 2016-2024, articulé avec le nouveau plan stratégique tel qu’adopté in fine, la résolution demande également, notamment :

- que le 51ème Comité permament établisse un mécanisme pour guider la politique de communication du secrétariat, et qu’une nouvelle approche pour améliorer et soutenir la CESP de la Convention soit définie, avec l’aide du GEST, et proposée à la prochaine COP ;

- que le secrétariat recherche un renforcement de la coopération avec les MEAs au travers du Groupe declinaison pour la Biodiversité ;

- que le secrétariat améliore le site web avec l’appui des Parties qui le souhaitent.

 

Du nouveau sur la définition du statut des sites Ramsar

La liste et le statut des sites Ramsar constituent l’ossature même de la Convention qui vise à ce que le plus grand nombre possible de zones humides remplissant au moins un des neuf critères de la Convention soit inscrit sur la Liste des zones humides d’importance
internationale. À l’heure actuelle, cette liste compte 2 188 sites répartis dans 168 pays. La résolution VI est l’occasion de rappeler qu’entre le 13 juillet 2012 et le 28 août 2014, la liste des sites désignés à la convention a augmenté de 149 unités : plus d’un site par semaine en plus, ce qui montre la vitalité de la Convention et l’intérêt manifesté par les États à inscrire leurs zones humides à la Convention.
Le secrétariat de la convention de Ramsar a néanmoins constaté que, sur ce total, 1 238 (soit 57 %) n’ont pas fourni d’éléments d’actualisation de leur fiche de renseignement ou une carte actualisée depuis la date de leur désignation. Ainsi, il n’est pas possible de disposer d’une vision précise de la situation des zones humides.
La Conférence des Parties a émis le souhait que les renseignements relatifs à ces sites soient actualisés très rapidement et que, pour l’ensemble des fiches, les informations contenues n’aient jamais plus de six ans d’ancienneté sans mise à jour. Ceci est d’autant plus important que les descriptions des sites se remplissent désormais en ligne et nécessitent de reprendre les informations à la base afin de renseigner les différents champs qui la composent. Un autre point important est qu’aucune partie contractante n’a ajouté de site au registre de Montreux, le registre des sites menacés, au cours des trois dernières années, tandis que pendant ce temps un seul site en a été sorti. Faut-il s’en réjouir ? Le manque d’informations sur les sites ne permet pas de dire si des sites mériteraient d’être inscrits ou non sur le registre de Montreux, ou à l’inverse d’en sortir
ou non. Un nouveau questionnaire a été présenté au cours de la conférence afin de renseigner les sites qui devraient entrer ou sortir du registre. Aucun site français n’est inscrit sur ce registre.
 

Le secrétariat de la convention de Ramsar, a mis en place d’une nouvelle interface web, dite RSIS, ou chaque fiche description ramsar devra être intégré dans les prochains mois. Cette procédure chronophage au début pour les parties contractants et leurs gestionnaires, devraient permettre une meilleure capitalisation et valorisation de ces données.

Sur proposition de la république de corée et de la Thaïlande, un cadre facultatif d'évaluation de l’efficacité de la gestion et de la conservation des Sites Ramsar, a été défini dans la résolution 15 de cette conférence.

 

Des villes labellisées Ramsar

Depuis plus de quarante ans, les zones humides d’importance internationales sont labellisées par la convention dite de Ramsar, du nom de cette ville iranienne située sur la mer Caspienne.
Désormais, des villes disposant de zones humides importantes, par leur biodiversité ou les services qu’elles rendent, en leur sein ou en périphérie vont pouvoir bénéficier d’un label « ville des zones humides » accréditée par la convention de Ramsar. L’initiative d’une résolution allant en ce sens a été lancée par la Tunisie et la Corée du Sud et a été soutenue par la France. La résolution vise à reconnaître les efforts entrepris par des agglomérations (villes ou villages) en matière de conservation de leurs zones humides intra muros ou des zones humides situées à proximité. Pour cela, une ville devra déposer une candidature montrant son implication et son activité en matière de conservation des zones humides et des services que ces dernières peuvent rendre, y compris pour la biodiversité. Elles doivent montrer que les activités menées sur leur territoire, comme l’agriculture, la gestion des forêts, la pêche, les activités liées au tourisme, contribuent à
la conservation des zones humides de son territoire et qu’elles sensibilisent les populations à adopter de bonnes pratiques de gestion.
Elles doivent également montrer qu’elles disposent d’une politique;allant dans ce sens, sous forme d’actions de sensibilisation, d’un centre d’éducation aux zones humides et de leur participation à la Journée mondiale des zones humides. Un comité local doit permettre de rédiger le dossier et est garant de la bonne application du label délivré pour six ans, renouvelable si la politique de la zone urbaine à l’égard de ses zones humides est restée équivalente ou s’est améliorée.
La procédure d’accréditation n’est pas encore lancée. Elle va nécessiter la mise en place d’un comité d’examen des candidatures au niveau international, avec au préalable un filtrage national.
Chaque pays pourra présenter neuf candidatures tous les trois ans, soit entre deux conférences des Parties. Nul doute que de nombreuses villes françaises déposeront.
 

Pour une mise en oeuvre effective en France

La circulaire ministérielle sur la mise en œuvre de la Convention de Ramsar en date du 24 décembre 2009 précise que l’inscription de zones humides au titre de la convention constitue un label international qui récompense et valorise les actions de gestion durable
de ces zones et encourage ceux qui les mettent en œuvre à les poursuivre. De nombreux gestionnaires de zones humides en France ont conscience de l’intérêt de la démarche, ce qui explique le nombre de sites déjà désignés (43) et les différents dossiers en  préparation pour désigner de nouveaux sites. Cette labellisation passe par de multiples phases avant l’attribution au site du diplôme, qui est délivré par le Secrétariat de la Convention.
La démarche permet de mettre à plat les connaissances, les problèmes, de dialoguer avec les différents partenaires afin d’obtenir une adhésion la plus large possible au projet.
Elle implique ensuite des obligations qui, sans être réglementaires, n’en demeurent pas moins fortes.
En effet, en signant la Convention de Ramsar, la France s’est engagée à rendre compte au secrétariat de la convention de la « conservation des caractéristiques écologiques » des zones humides dont elle a obtenu l’inscription.
 
La labellisation n’est donc pas une couche de plus dans un mille-feuille administratif incompréhensible, mais un excellent moyen de responsabiliser les acteurs locaux ou nationaux à la nécessité de prendre et d’appliquer des mesures destinées à assurer la pérennité et le bon fonctionnement du site considéré.
 
L’engouement suscité lors de la 12èm Conférence des Parties par la résolution créant une nouvelle labellisation destinée aux collectivités urbaines montre la vitalité de la convention, le besoin ressenti par les gestionnaires de zones humides d’utiliser des outils de sensibilisation destinés à susciter l’intérêt des citadins et péri-urbains pour leur environnement.
Le nouveau plan stratégique 2016-2024, accompagné d’un nouveau Programme de communication- sensibilisation et d’un nouveau Cadre de travail scientifique et technique, la création d’une nouvelle labellisation des villes, la description en ligne des sites, les outils d’évaluation de la gestion sont autant de moyens nouveaux qui vont faire entrer la convention dans une nouvelle phase de son existence.
 

Page mise à jour le 09/12/2015
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