Rapport - Dialogue territorial pour la protection et la valorisation des zones humides, et la création d’un parc national
Un an de dialogue territorial approfondi dans dix-huit sites emblématiques des zones humides françaises pour renforcer leur protection et leur valorisation, et créer un parc national spécifiquement consacré à ces milieux.
Contexte
La mission s’inscrit dans le contexte d’une prise de conscience générale du fort déclin des zones humides au niveau mondial comme en France (64% des zones humides ont disparu au XXème siècle) alors que ces milieux constituent un enjeu majeur tant pour leur richesse en termes de biodiversité, pour la régulation et l’épuration des masses d’eau que pour la captation et le stockage du carbone, au-delà de leur valeur culturelle et sociétale.
Pour répondre à ces enjeux, il avait été décidé lors du Grenelle de l’environnement, outre le renforcement des protections des milieux humides, de créer un parc national dédié aux zones humides. La stratégie nationale pour les aires protégées (SNAP) adoptée le 12 janvier 2021 a repris ce projet, avec l’objectif de doubler la protection forte des zones humides françaises de métropole et d’en protéger 110 000 ha d’ici 2030. Le 4ème plan national milieux humides (PNMH) 2022-2026, intégré à la stratégie nationale biodiversité (SNB) confirme la volonté de créer un parc national dédié à ces milieux.
Pour mettre en œuvre ces engagements, une première mission exploratoire dont le rapport a été publié en avril 2022, recommandait, après avoir identifié 18 territoires parmi les plus emblématiques des zones humides françaises, de conduire un dialogue territorial approfondi avec toutes les parties prenantes sur chaque site. Parmi ces sites, huit concernent des zones humides et marais littoraux et estuariens, quatre des plaines intérieures, trois des vallées alluviales, deux des massifs de tourbières et un, une zone humide ultra-marine.
Bilan de cette seconde mission
La présente mission a donc conduit ce dialogue territorial sur ces 18 sites entre juin 2022 et janvier 2023 et rencontré 1 200 personnes. De ces visites et auditions, elle dresse un constat et formule des recommandations avec trois objectifs :
- pour chaque site, faire des propositions d’actions exemplaires, pilotes et ou transférables :
Au total, 90 actions ont été retenues par la mission, portant sur la reconnaissance nationale ou internationale, le maintien de pratiques agricoles et piscicoles extensives, la mise en place d’une gouvernance spécifique notamment pour la gestion de la ressource en eau, la mobilisation d’outils de protection forte, la mise en place de moyens de contrôle, l’amélioration des connaissances et la maîtrise du foncier. Ces actions répondent explicitement aux objectifs du PNMH et ont vocation à être accompagnées techniquement et financièrement par l’État (PNMH, Fonds vert) associé à d’autres contributeurs (Europe, collectivités territoriales, agences de l’eau, etc.). La mission a également mis en exergue des bonnes pratiques locales qui gagneraient à être diffusées plus largement car elles contribuent à la protection des zones humides.
- faire des propositions et des recommandations pour améliorer les politiques publiques ayant un impact sur les zones humides :
Le dialogue territorial, conduit par la mission, a permis d’identifier des sujets communs de préoccupation qui font écho à des politiques publiques nationales. La mission propose quelques pistes d’amélioration dont les administrations nationales pourraient se saisir pour les adapter aux zones humides. Ces pistes portent sur : i) le maintien et le confortement d’une agriculture et d’une pisciculture favorables à la biodiversité ; ii) la mise en œuvre et le déploiement d’outils fonciers ; iii) une fiscalité en faveur des zones humides ; iv) l’adaptation de la réglementation ; v) des outils d’interventions spécifiques ; et vi) l’amélioration de la connaissance et de la sensibilisation sur les zones humides.
- recommander un à trois sites pouvant s’engager dans une démarche de création d’un parc national :
Objet initial de la commande, la mission a évalué chaque site en fonction de sa valeur intrinsèque, de la plus-value de l’outil parc national pour répondre aux enjeux spécifiques du territoire et enfin de l’acceptabilité territoriale à la création d’un parc national. Pour ce dernier critère, la mission a noté des positions très tranchées de certains acteurs contre un parc national et plus nuancées pour d’autres. La plupart des personnes auditionnées ont exprimé mal connaître l’outil et ses caractéristiques en termes d’adaptation des usages, de gouvernance et de moyens mis au service du développement local. Cela conduit à penser que les positions pourraient évoluer, pour certains territoires, à la faveur d’une concertation conduite avec l’ensemble des parties prenantes. Dans ce contexte, il ne ressort pas des dialogues territoriaux un territoire clairement candidat.
La mission a néanmoins identifié trois sites d’exception. Elle propose des éléments de méthode afin de réunir les conditions favorables à la création d’un parc national et/ou à l’émergence d’un projet ambitieux pour ces zones humides, à la hauteur de leur valeur intrinsèque.
Parmi les sites identifiés, le marais de Kaw-Roura, dans un périmètre élargi pour intégrer notamment la partie littorale, apparait comme celui où un parc national est le mieux à même de répondre aux besoins de protection et de mise en valeur du site au profit du développement local. A cet effet, la mission propose un plan d’actions global intégrant une phase de préfiguration du projet de parc, ainsi qu’un plan de transformation du parc naturel régional (PNR) de Guyane.
En métropole, la Camargue dans son périmètre de la réserve de biosphère, et l’estuaire et le cours de la Loire aval sont également des sites qui, compte tenu de leur valeur intrinsèque et de la plus-value de l’outil parc national, peuvent prétendre à ce label prestigieux. Cependant les conditions ne sont pas réunies à ce jour pour engager une telle démarche de création. La mission propose en conséquence que pour ces deux sites, soit conduit un dialogue territorial et prospectif afin de construire un projet de territoire permettant de traiter les enjeux actuels et de long terme. Pour conduire ces chantiers, des moyens spécifiques sont à dédier.
Dans ces trois territoires, il est impératif de mener au préalable une concertation avec les grandes collectivités territoriales concernées, afin que l’État et les élus portent conjointement un projet ambitieux pour ces territoires d’exception.
En savoir plus
- Télécharger le rapport "Mission relative à la création d’un parc national de zones humides" mars 2022